Accueil pour toutes et tous
Très rares sont les femmes parmi les migrant.es pour lesquel.les se mobilise le Collectif de soutien aux exilé.es 44. Mais elles représentent la majorité des militant.es qui se regroupent
pour agir et aider.
En ce chaud dimanche du 25 juin, des femmes et des hommes du Collectif de soutien aux exilé.es 44 se sont rassemblé.es et ont rappelé qu'elles/ils exigent un engagement de la Ville pour celles et ceux qui viennent chercher à Nantes un appui pour reconstruire leur vie détruite. Derrière le terrain vague où s'est installé le pique-nique, des tags ont envahi les murs d'un bâtiment laissé vide depuis plusieurs années. Cette ex-maison de retraite fait partie des lieux que le Collectif a sélectionnés comme pouvant, devant, devenir un lieu d'accueil pour plusieurs des trois cents migrant.es dont Nantes fut le point d'arrivée. Comme les autres lieux, elle ne nécessite pas de gros travaux couteux. Moins d'aménagements que n'en exigent les squatts où s'entassent les exilé.es avant d'en être chassé.es, travaux qu'elles/ils assument d'ailleurs elles/eux-mêmes, avec l'aide du Collectif. Moins d'argent qu'un équipement de loisirs municipal, fût-il édifié avec l'assentiment des habitant.es. "On nous oppose que les services sont "débordés", mais la loi les oblige à proposer des lieux décents", insiste Laurence Ortega, membre du Gasprom et l'une des actives du Collectif. "Ça n'est pas un problème de loger trois cents personnes et de trouver cent-cinquante places de collège. Il y a des fois où simplement, la démographie du pays a soulevé la question et la réponse a été trouvée."
Le Collectif est né à Nantes fin 2012, en accompagnement de mouvements forts, fédéré par l'occupation du Lieu Unique, puis l'expulsion violente du grand squatt de la rue des Stocks en 2014. À sa création, il se préoccupait des personnes à la rue, quelle que soit leur nationalité. Aujourd'hui, les migrants sont largement majoritaires, "des hommes jeunes, en moyenne 30 ans. Ils ont rarement des solutions. Alors, ils se retrouvent dans des squatts." Très peu de femmes. "Les femmes viennent rarement seules, plus souvent avec leurs enfants. Elles ont perdu leur mari, ou bien ont vécu un petit moment de vie avec un compatriote puis les couples se sont défaits. Elles prennent contact avec des associations pour avoir au moins des papiers justifiant leur présence, obtenir un appartement. Quand elles ont subi des violences, la mise à l'abri devient encore plus importante. C'est difficile parce que les squatts sont occupés par des jeunes hommes. On fait des petits secteurs isolés. Il y avait une femme âgée qui ne voulait pas sortir de sa chambre, elle avait peur. Ça n'est pas évident de se retrouver avec des gens qu'on ne connaît pas, qui ne parlent pas votre langue... Beaucoup de femmes passent par l'hôpital, pour une grossesse ou pou un état de santé très dégradé." Peu de femmes parmi les migrant.es, mais beaucoup parmi les militant.es; deux tiers, estime Laurence Ortega. Les motivations, et l'âge sont en revanche très diversifiés. "Les personnes arrivent individuellement ou parce qu'elles participent à un mouvement, souvent familial. Des étudiant.es ont été prévenu.es sur le campus; beaucoup s'occupent des enfants. Des parents ont été sensibilisé.es par le cas d'un camarade de classe de leurs filles ou fils. Des gens hébergent des migrant.es; souvent ils sont plus âgés et disposent de chambres libres. Celles et ceux qui viennent par militantisme ont n'importe quel âge." Au total, il y a plus d'une centaine de personnes dans le Collectif, une cinquantaine d'impliqué.es assidu.es, une douzaine d'actif.ves régulier.es, "trop peu parce qu'il y a beaucoup de tâches."
Parmi les présent.es à la rencontre, beaucoup s'investissent dans l'accueil des mineur.es isolée.es, de plus en plus nombreux sur notre territoire. Presque uniquement des garçons, de 14 à 17 ans, peut-être partis avec un aîné mais désormais non accompagnés. Leur revendication et leur besoin essentiel : la scolarisation. "Avant, la scolarisation était inconditionnelle, maintenant c'est le refus", résume Laurence Ortega, qui souligne l'impossibilité financière pour les associations d'avoir recours aux écoles privées qui accepteraient l'entrée de ces élèves décalés du circuit scolaire coutumier. "Trois groupes ont trouvé des formes de scolarisation avec des bénévoles". Des solutions lourdes dont la pérennité n'est pas garantie. Et pourquoi, une fois encore, des associations prendraient-elles en charge des responsabilités que l'État doit assumer ? Le Collectif Hébergeurs solidaires rassemble des personnes qui accueillent chez elle ces mineurs. Il compte Gwenola Calvez, plasticienne. "Depuis les Beaux-Arts, je travaille sur les questions de déshumanisation". Son travail plastique, photographie, création de volumes à base d'espaces, elle le nourrit en allant "à la rencontre des personnes". Par exemple, elle va sur les terrains où vivent des Roms, y fait dessiner des enfants, y photographie des familles. "Tout est imbriqué, en fait. Mon travail plastique est en corrélation avec ce que je vis. Je ne peux pas faire autrement, je me sentirais pas à ma place." Elle agit actuellement avec le collectif Dessins sans papiers. "Quand j'ai su qu'un collectif se montait, c'était une évidence que j'en sois." Les plasticien.nes vont chercher les jeunes dans les squatts, aux endroits où ils se rencontrent, et leur proposent de dessiner. Ainsi racontent-ils leurs histoires, sans les mots qui leur manquent. Le Collectif expose les dessins. "C'est très fort, ce qu'on voit. Des fois, leur histoire est dramatique. Ça aide à sensibiliser les gens". Dans l'espace ombré où Gwenola Calvez a posé papier et crayons, les garçons s'installent et commencent à dessiner sans avoir le moindre besoin qu'on les y pousse. L'outil d'expression, pour inhabituel qu'il soit, remplit visiblement son rôle.
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