Citad'Elles bientôt ouverte
Le Centre post-traumatique voulu par la Ville de Nantes ouvrira ses portes le 25 novembre. Pas à tout le monde, car les hommes ne pénétreront pas dans ce vaste lieu destiné aux femmes
victimes de violences, accompagnées ou non de leurs enfants, appelés ici "co-victimes".
Un espace clair et ouvert (750 m2 de surface), une moquette douce, de multiples coussins, des murs doublés qui étouffent les sons, un chemin lumineux qui apprivoise les couloirs, une pièce de ressourcement où trouver du repos… Tout est conçu à Citad'Elles pour procurer sûreté et confort. Une vitre sépare la salle où sont reçues les dames de celle où des professionnelles accueillent les enfants co-victimes; elles et ils peuvent ainsi se voir, se rassurer sur leur bien-être mutuel. Les femmes majeures victimes de violences, physiques ou psychologiques, peuvent y venir sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sans conditions et en toute gratuité. Situé au 7e étage d'un immeuble moderne, le lieu préserve la discrétion. La présence d'agents, de caméras et de portes blindées sur le parcours d'entrée garantissent la sécurité. Il a régné sur le chantier, entre la maire de Nantes Johanna Rolland, instigatrice, les partenaires institutionnels ou associatifs, l'architecte cheffe de chantier, la dizaine d'entreprises sollicitées, une entente rare, rendue possible par l'engagement de toutes et tous. L'exigence de qualité avait un sens, compris et respecté.
Le point fort du centre est de proposer un guichet unique où les victimes puissent trouver les réponses aux différents problèmes qu'elles subissent : questions policières, judiciaires, sociales, médicales, d'éducation, nouveau départ dans une vie assainie… Car passer de services en services, pas toujours bien coordonnés, les fragilise encore dans une démarche déjà difficile. Citad'Elles n'est pas une structure d'hébergement, bien que trois appartements, dont la localisation est tenue secrète, puissent répondre aux besoins de logement impérieux. On y traite l'urgence. Des professionnelles (14 personnes prévues) répondront aux questions, aideront à faire le bilan de la situation, enclencheront les soins et les démarches nécessaires, orienteront vers des organismes susceptibles d'assurer le suivi. Ce pourra bientôt être le Centre régional pour la prise en compte du stress post-traumatique, annoncé par l'ARS (Agence Régionale de la Santé). L'accueil, voulu chaleureux, prendra le temps qu'il faut, sans expédier des femmes déjà soumises à une pression de tous les instants.
Le projet, débuté en 2014, résulte des actions locales antérieures. Une histoire non sans remous et on se rappelle à Nantes l'association D'une rive à l'autre, si compétente, si efficace, dont les psychologues féministes et le conseil d’administration qui la composaient durent décider la fermeture, faute de soutien. Cette fois, les associations, qui appelaient de leurs vœux l'ouverture d'un centre, furent écoutées puis consultées. L'expertise des associations travaillant depuis des années sur le terrain est précieuse pour que Citad'Elles non seulement fonctionne mais avance. Peu de professionnel.les, que ce soit dans les domaines de la police, de la justice, de la santé, des services sociaux, sont formé·es sur le sujet des violences faites aux femmes. Qui formera celles et peut-être ceux qui exerceront au centre ? Cette expérience inédite mènera-t-elle à une réflexion plus approfondie sur les méfaits du patriarcat ? En tirera-t-on des analyses, étudiées par des chercheuses, transmissibles à celles et ceux que le grave problème des violences faites aux femmes préoccupe et pouvant, vite et bien, faire avancer les réponses ? Les associations concernées se félicitent que Citad'Elles existe. Mais elles espèrent rester associées au fonctionnement du centre. Elles ont été entendues sur leurs attentes et leurs perspectives de collaboration. Encourageant.