Véronique Lécureuil, motarde
« Il n’y a pas de raison qu’on leur laisse ça ! »
Véronique Lécureuil ne s’est pas laissé rebuter par le machisme du milieu des motards. Elle a rejoint l’association Toutes en motos !, dont le succès croissant prouve que les femmes sont nombreuses à vouloir affirmer et vivre leur passion.
Véronique Lécureuil a voyagé dix ans en moto derrière son mari. Largement le temps d’éprouver son attachement à ce loisir. Mais : « Je m’ennuyais derrière. Avec ma copine Jackie, on a décidé de passer notre permis. ».
Même si leur nombre augmente, les femmes pilotes restent très minoritaires : environ 20% des motard.es. « Je me suis vite aperçu que le milieu était machiste, raconte Véronique Lécureuil. Surtout le milieu des Harley où j’évolue avec mon mari. C’est difficile de s’intégrer pour une femme. On nous ignore, on ne s’adresse jamais à nous. Mais il n’y a pas de raison qu’on leur laisse ça ! » Jackie et elle voyagent toujours en groupe de cinq à dix motos, mais elles sont les deux seules femmes à piloter leur propre véhicule. Les autres sont « derrière ».
Tradition contre innovation
En 2009, l’entreprise où Véronique Lécureuil exerce le métier de comptable déménage pour Saint-Nazaire. « J’étais bien où j’étais. J’ai choisi le licenciement économique et j’ai décidé de tenter autre chose. » Son idée : ouvrir à Nantes une boutique de vêtements et accessoires moto pour femmes. L’association Toutes en moto ! , avec laquelle elle a déjà lié des contacts, trouve le concept intéressant. Elle se lance.
Le magasin ne reçoit cependant pas un accueil enthousiasme du « milieu ». « Les hommes trouvaient le principe sexiste, alors que tous les autres vêtements sont vendus dans des boutiques séparées ! » Véronique Lécureuil constate avec surprise que les femmes ne viennent jamais sans leur mari : « Même les femmes pilotes ont besoin de son avis pour choisir. » Les hommes rechignent à investir pour leur passagère, bien qu’en moto, l’équipement soit une question de sécurité.
Pour sauver son commerce, Véronique Lécureuil décide de le rendre mixte. Mais la « crise » réduit la clientèle et elle doit fermer. « Je ne regrette rien. C’était une expérience intéressante qui m’a permis de rencontrer plein de gens. »
Toutes en moto !
Parallèlement, elle a intensifié ses liens avec Toutes en moto !. L’association a organisé un premier défilé de motardes en 2009 à Paris. En 2010, l’initiative essaime à Marseille. Véronique Lécureuil suggère de l’étendre à Nantes. En 2013, treize villes en France participent, ainsi que Genève et Marrakech. Symboliquement, le défilé, organisé en partenariat avec Femmes Solidaires, a toujours lieu le dimanche suivant le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes.
Toutes à moto ! rassemble quelque treize mille motardes. Son objectif ? « Montrer qu’on fait nos vies sur nos motos. On sait le faire ! Aussi bien qu’eux ! ». Et évidemment, « faire en sorte que le milieu devienne moins macho ».
L’association encourage les femmes « derrière » à passer leur permis pour devenir pilote. Véronique Lécureuil raconte qu’il est très rare qu’une femme obtienne son permis moto du premier coup. « Les jeunes femmes y arrivent, mais les plus âgées doivent s’y reprendre à plusieurs fois. Moi, je l’ai eu à la cinquième fois ! » Le problème des candidates, c’est l’épreuve chronométrée, qui les pénalise parce qu’elles prennent moins de risques. L’explication officielle est que, devenues mères, les femmes appréhendent le danger d’une autre façon que les hommes. Admettons. Ne pourrait-on cependant envisager que la prudence représente un avantage ? « Après ça l’est, confirme Véronique Lécureuil. Mais pour le permis, c’est pénalisant. »
Les choses devraient évoluer car depuis janvier 2013, « l’épreuve rapide » n’est plus chronométrée.
En savoir plus sur l’association Toutes en moto !