Garfillonces, dans la cour de l'égalitéE
Pour son projet d’école 2014-2015, l’école primaire Plessis-Cellier de Nantes avait choisi le thème de la mixité : bien vivre ensemble entre filles et garçons. Elle fait appel à des intervenant.es représentant tous les arts de la scène. Ce projet créatif et dynamique reçut le charmant nom de Garfillonces.
Ce vendredi 12 juin 2015, c’est
l’effervescence à la Fabrique Bellevue-Chantenay, place Jean-Macé : enseignant.es, artistes et animateur/trices intervenant.es, organisateurs (Direction de l'Éducation de la Ville de Nantes,
Nantes Action Périscolaire[1]) et écolier.es règlent les derniers détails du Musée Garfillonces qui en fin de journée, sera ouvert aux parents. Les
familles découvriront les travaux des enfants au fil d’un parcours à travers sous-sols, coulisses et salle de spectacle. Alternant théâtre, réalisations plastiques, jeux de lumière, jeux du
cirque et musique, ce Musée n’a vraiment rien de statique. Il résulte d’un travail fouillé sur toute l’année.
En Voixture, tout le monde !
Louise Coly,
étudiante du Master Valorisation du patrimoine, en stage au service de la Réussite éducative de la Ville de Nantes, consacré cinq mois de son stage aux projets d’éducation artistique et
culturelle. Elle a accompagné celui-ci avec passion car elle souhaite « travailler sur le terrain ». Le Jour J de la présentation publique, elle conserve assez de sang froid pour en
résumer l’historique. Travailler sur la mixité intéressait déjà les enseignant.es de Plessis-Cellier depuis plusieurs années. En résidence dans l’école en 2014, les comédiennes-chanteuses de
En Voixture Simone ont impulsé la « bulle artistique ». Les duettistes
féministes ont résolument choisi l’humour pour défendre l’égalitéE, et choisi de s’adresser aussi aux jeunes ; elles adaptent pour eux leurs spectacles piquants, qui suscitent des débats. A
Plessis-Cellier, elles avaient commencé par la création, à partir du texte Mon frère, ma princesse de Catherine Zambon, d’une chanson intitulée Garfillonces. Le nom est resté pour le projet « Arts de la scène » qui démarra en septembre 2014. Le
projet s'est déroulé chaque mardi après-midi de l'année, sur le temps péri-éducatif géré par la Ville de Nantes (par le biais du secteur de vie éducative Centre-Ouest), qui a choisi d'y conduire
un projet artistique en lien avec l'équipe éducative.
Jusqu’en décembre, les élèves découvrirent librement les ateliers qui leur étaient proposés. En janvier et février, elles et ils en intégrèrent un pour y préparer une création présentée à l’école fin février. Enfin, début mars, elles et ils choisirent, selon leurs goûts et affinités, l’atelier au sein duquel elles et ils prépareraient le Musée Garfillonces jusqu’en juin.
Des artistes à l’école
Au total, cent soixante-dix élèves du CP au CM2 participèrent à douze ateliers. Pour réussir, le projet nécessitait une mobilisation générale : celle des enseignant.es, des animatrices et animateurs de NAP (Nantes Actions Périscolaires) et d’associations. De nombreux.ses artistes nantais.es furent invité.es à intervenir, sous la direction artistique de Christophe Chauvet (Les gens de la Lune - Nantes) : la danseuse Lauriane Douchin (Musique et Danse en Loire-Atlantique), les comédiennes Marylou Couvreur-Delaitre (compagnie SBAM) et Audrey Chavaribeyre (Azimut théâtre), le comédien Lionel Pavageau (Les gens de la Lune - Nantes), le musicien Axel Ferré (Conservatoire de Musique), l’éducatrice sportive Sophie Coutanceau pour les arts du cirque, Cécile Grimaud et le CRV pour les Portraits, le collectif Makiz'art pour le cinéma, Style Alpaga pour les costumes, Thomas Fouillet au son et à la lumière. Une équipe de journalistes en herbe suivit et transmit sur des panneaux le déroulement du travail, guidé.es par l’animateur Kevin Mainguy.
Le 12 juin, donc, après installation des œuvres et des décors, filages et dernière mise au point, les participant.es étaient prêt.es à accueillir les parents pour une visite du Musée Garfillonces qui se distinguait nettement des kermesses coutumières.
Une soirée étonnante
Réparti en trois groupes, le public suit des enfants guides sur un parcours sinueux. Au sous-sol, il visite le vestiaire des costumes, et assiste à des saynètes données par les plus jeunes. A travers des phrases tendres sur leurs parents lancées de derrière un rideau, des enfants dévoilent innocemment une organisation familiale qui demanderait à évoluer vers plus d’égalitéE.
Dans la salle de spectacles, on découvre des jeux sur la lumière, des œuvres thématiques moquant les rôles attribués à l’un ou l’autre sexe, tandis que de jeunes jongleurs s’échangent des cerceaux. Sur la scène, cinquante enfants prennent place pour leur concert. Le musicien Axel Ferré a créé et mis en place le spectacle. Cet instrumentiste, enseignant en musique et chef de chœur vient de quitter le Racing-club choral, connu pour ses reprises rigolotes et bien balancées de succès tous azimuts, pour se lancer dans de nouvelles aventures musicales. Sa création pour le Musée Garfillonces allie rigueur et fantaisie. Les enfants jouent et chantent ensemble, avec une remarquable énergie et un plaisir visible. Les chansons originales, écrites en atelier, questionnent l’identité de genre, les règles imposées aux filles et aux garçons, les barrières dressées entre elles et eux. Souvent amusantes, elles n’en sont pas moins subversives. Cependant, les parents applaudissent chaleureusement – convaincu.es, on l’espère.
A la sortie, buvette et restauration les attendent place Jean-Macé. L’initiative revient aux parents d’élèves avec la CSF (Confédération syndicale des familles) de Bellevue. Pascale Milpied, une de ses actives militantes note : « C’était bien que Bellevue vienne à Chantenay. »
[1] L'association Nantes Action périscolaire (NAP), liée à la Ville dans le cadre d'un marché public, a pour mission de gérer et d'animer le temps périscolaire dans les écoles publiques nantaises.